Ce qu'il faut faire pour voltiger "droit"
Régler son avion en 10 étapes
La voltige peut s’effectuer avec des avions plus ou moins adaptés, depuis le simple trainer remuant jusqu'au multi de compétition, mais cette discipline réclame surtout des avions bien construits, c'est-à-dire sans le moindre défaut. Cela permet de garantir, en vol, un comportement parfaitement neutre ce qui diminuera certains mixages qui peuvent améliorer certains conditions de vols mais qui peuvent nuires dans certaines configurations de vols. Toutefois, c'est loin d'être suffisant car ledit avion destiné à la voltige doit en outre être réglé de façon parfaite.
Les 10 étapes de ce dossier sont à
scinder en deux parties distinctes : il y a tout d’abord les réglages
statiques, qui s'opèrent en atelier, puis les réglages dynamiques,
qui s'affinent en vol. Préalablement à toute tentative de quoi
que ce soit, il est impératif que la construction des différents
éléments de votre avion ait été parfaitement maîtrisée,
faute de quoi il est illusoire de s'attendre à un comportement en adéquation
avec les besoins de rigueur que suppose la voltige. Avec un avion "tordu",
sauf si vous êtes champion du monde de la mayonnaise, vous rencontrerez
inévitablement des difficultés durant le vol, ce qui ne facilitera
pas votre tâche de voltigeur. Mais si vous respectez les conseils de ce
dossier, vous aurez mis toutes les chances de votre côté pour avoir
un avion sain, volant "droit", et capable de vous mener sur la plus
haute marche du podium, ou pour le moins de vous apporter le plaisir d'un pilotage
optimal.
Bien sûr, ce qui suit (notamment les réglages en vol) n'est pas
transposable à un avion de début, qui n'est pas du tout destiné
au même registre de vol. Par contre, n'importe quel trainer à ailerons
pourra profiter de ces conseils, et bien des pilotes seront d'ailleurs surpris
de voir le comportement de leur avion transformé par la seule "magie"
de réglages faits consciencieusement !
1 – La mise en croix termine la construction
Le premier point à surveiller, après
la réalisation des différents éléments de l'avion,
concerne sa mise en croix : négliger cette première étape
du réglage d'un avion (et en même temps ultime étape de
la construction), c'est anéantir tout espoir de réglages ultérieurs.
Par contre, une mise en croix réussie (ne pas hésiter à
y passer du temps) vous fera gagner beaucoup de temps plus tard lors des réglages
en vol.
En premier lieu, il faut que les ailes soient fixées perpendiculairement
à l’axe longitudinal (et vertical) du fuselage. Puis c’est
au tour du stabilisateur d'être aligné, à la fois perpendiculairement
à l’axe longitudinal du fuselage lui aussi, mais également
parallèlement aux ailes, ce qui se vérifie en regardant l’avion
par l'arrière. Enfin, la dérive doit être d’équerre
par rapport au stabilisateur. A défaut de tout ceci, quand l’avion
effectuera par exemple des boucles ou des montées verticales ou à
45°, il aura tendance à partir de travers : difficile, dès
lors, d'attaquer une figure dans de bonnes conditions. En effet, en désaxant,
l'avion se positionnera mal pour réaliser la figure ou pour enchaîner
la suivante. Bref, ce sera beaucoup de torture des manches pour un résultat
pas fameux.
2 – L'équilibrage latéral est trop souvent délaissé
L'équilibrage longitudinal, tout le monde
connaît : il s'agit du centrage, que chacun respecte à peu près.
On va y revenir… Mais il est un autre équilibrage bien souvent
ignoré : celui latéral de l'avion. Cela concerne essentiellement
les ailes dont on doit surveiller l’équilibrage durant la construction
mais également une fois qu'elles sont terminées. Sur une paire
d'ailes en polystyrène coffré, je vous conseille de faire une
pesée avant de coller les diverses baguettes de chant car une aile "brute"
peut être plus lourde que l'autre, or on peut intervenir dès ce
stade pour compenser ce déséquilibre. En utilisant par exemple
les baguettes les plus lourdes sur l'aile la plus légère, on peut
atténuer voire annuler la différence de poids entre aile droite
et aile gauche. Si vous construisez en structure, le pesage préalable
des nervures, longerons et coffrages doit vous permettre d'équilibrer
les masses dès la construction. Si vous n’effectuez pas cet équilibrage
latéral, vous serez probablement obligé, en vol, de trimer votre
avion d'un côté pour compenser le poids de l’aile plus lourde,
ce qui n'est pas l'idéal sur le plan aérodynamique (traînées
parasites…).
Pour savoir, en vol, si l’équilibrage des ailes d'un avion est
bon, j’effectue le test suivant : je place l'avion sur le dos, puis je
réalise de longues lignes droites sans toucher le manche des ailerons.
Si l'avion penche d’un côté (obligatoirement celui de l’aile
la plus lourde), il faudra corriger avec du plomb dans l’aile la plus
légère. Je vous conseille de réaliser ce test à
plusieurs reprise durant un vol, pour détecter avec certitude l’aile
la plus lourde, ce test devant naturellement être réalisé
un jour où le vent est nul.
3 – Le centrage se fait d'abord à l'atelier
Eh oui, vous n'y échapperez pas, outre l'équilibrage latéral, il faut vérifier le centrage de votre avion. En premier lieu, il sera réglé comme indiqué par le plan ou la notice : le CG (comme il est noté sur les plans) se trouve généralement à 33% de la corde moyenne sur un modèle standard ayant un bras de levier arrière normal et des ailes sans flèche particulière (c'est-à-dire 1/3 au bord d'attaque et 2/3 au bord de fuite), comme sur les avions type CAP, Extra ou petit multi. Sur les multis modernes "2+2", dont le fuselage est désormais plus long que l’envergure des ailes, le centrage est plus arrière, pouvant même se retrouver parfois à 40 voire 50%.
4 – Calage de base du moteur
Les réglages de l'avion sont déjà
dégrossis, sauf en ce qui concerne le calage du moteur, qui n'a été
qu'approché lors de son installation (selon le fabricant du kit ou vos
critères de base). Ce calage, ou plus exactement ces calages (piqueur
et anticouple), ne doivent eux non plus pas être négligés
car un moteur mal calé aura des effets pervers (car variables selon son
régime) sur les trajectoires de l'avion. Si les valeurs de piqueur et
d'anticouple ne sont pas données par la notice ou par le couple pare-feu
(voire par le couple avant du fuselage par où sort l'arbre d'hélice,
sur lequel on aligne parallèlement le flasque arrière du cône),
on peut les régler à l'aide d'un incidence-mètre. Hélas,
il n'y a pas de recette miracle pour déterminer ces angles de calage
qui dépendent du modèle lui-même mais aussi du moteur utilisé
et de l'hélice également. La règle de base est par contre
simple : il faut 0 à 3° d'anticouple (orientation du vilebrequin
vers la droite) et à peine autant de piqueur (orientation du vilebrequin
vers le bas), ceci pour un modèle de voltige.
Ce quatrième point de réglage statique termine la phase "atelier".
Tout cela va devoir maintenant être validé en vol…
5 – Les premiers vols, pour voler droit
Les premiers vols (au fait, saviez-vous qu'il
faut parfois plusieurs dizaines de vols pour régler finement un multi
de F3A de haut niveau ?!) permettent tout d'abord de valider ce qui précède,
c'est-à-dire la rectitude globale de votre construction ainsi que l'équilibrage
latéral et longitudinal de l'avion. On reviendra plus tard sur le peaufinage
du centrage…
A pleins gaz, il faut impérativement que votre avion vole parfaitement
droit, c’est-à-dire qu’il ne s'incline pas sur une aile ni
qu'il grimpe au ciel ou pique vers la planète quand on n’actionne
pas les manches. Si ce n’est pas le cas, les corrections se font d'abord
aux trims, puis après atterrissage il faut faire ces corrections en agissant
sur les tringleries de commande afin de pouvoir remettre les trims au neutre.
A ce stade, le test de l'équilibrage latéral conduira peut-être
à placer un peu de plomb dans le saumon de l'aile jugée la plus
légère, jusqu'à pouvoir remettre le trim des ailerons au
neutre.
6 – Deux tests pour affiner le calage du moteur
Une fois estimés, les deux calages du
moteur sont à valider en vol. Personnellement, j’utilise la méthode
suivante, à effectuer comme n'importe quel autre réglage dynamique
par temps neutre et sans vent :
- pour le piqueur, avion à plat, j'enchaîne des réductions
de régime puis des remises de gaz progressives. Si le piqueur n’est
pas bon, l'avion va présenter des variations d’altitude de la façon
suivante : trop de piqueur et l’avion aura tendance, s'il a été
trimé pour voler à plat aux pleins gaz, à remonter lors
de la réduction des gaz, pas assez de piqueur et l'avion aura tendance
à piquer lors de la réduction des gaz (toujours s'il a été
trimé pour voler à plat aux pleins gaz). Par contre, si l’avion
garde une trajectoire horizontale lorsque vous coupez brutalement les gaz, le
calage de son piqueur est parfait.
- pour l’anticouple, c’est assez simple à voir : si l’avion
ne reste pas sur une ligne de vol parfaitement droite durant une montée
verticale, c’est que le calage n’est pas bon. S'il a tendance à
partir sur la gauche, c’est que le moteur manque d’anticouple, et
si l’avion part sur sa droite durant la montée, c’est que
l’anticouple est trop prononcé. Pour info, un avion doit pouvoir
renverser à droite comme à gauche sans problème.
Cette méthode, très pragmatique, est assez simple à utiliser,
mais pour en valider les résultats, il faut impérativement renouveler
les procédures de nombreuses fois : inutile, par précipitation,
d'ajouter un défaut en pensant en corriger un autre, faire ces essais
sans vent impérativement.
7 – Le centrage doit être validé en vol
Il reste à se concentrer sur le centrage
de l'avion, important pour n'importe quel modèle mais primordial pour
un voltigeur. Ce paramètre rentre notamment en ligne de compte dans de
nombreuses figures comme les vrilles, les déclenchés, le vol dos,
les trajectoires horizontales et verticales, etc… enfin bref dans un programme
complet le centrage entrera en jeu pratiquement dans toutes les figures. Pour
savoir si mon avion est bien centré, je réalise le test suivant
: je le place sur une pente ascendante à 45°, pleins gaz, puis j’effectue
un demi-tonneau et je laisse immédiatement après le manche de
profondeur au neutre. J’étudie alors le comportement de l’avion,
trois cas pouvant se présenter, qui vont permettre d'identifier la nature
du centrage :
- si l’avion a tendance à piquer du nez pour revenir vers le sol
de façon marquée, c'est que le centrage est trop avant. C'est
certes bon pour obtenir une relative "auto-stabilité" d'un
modèle de début, mais ce n'est pas exactement l'idéal pour
un avion de voltige.
- si, au contraire, l’avion a tendance à accentuer sa montée,
c’est que le centrage est trop arrière et il y a danger. Ce centrage
arrière peut être confirmé par un besoin inexistant de piquer
quand l'avion est en vol dos.
- quand l’avion continuera de façon rectiligne sa trajectoire sous
45° durant quelques secondes, avant d'effectuer lentement un retour vers
le sol, alors vous pourrez considérer que le centrage est bon. Cela peut
être confirmé par un petit vol dos, qui ne doit nécessiter
qu'une faible action à piquer sur le manche de profondeur.
Un bon centrage facilite l’exécution de certaines figures comme
par exemple le tonneau à 4 facettes ou le tonneau lent, car l'action
sur le manche de profondeur sera réduite et, en conséquence, la
figure sera plus facile à maîtriser car demandant moins de corrections.
8 – Les ailerons peuvent réclamer un peu de différentiel
De quoi s'agit-il ? Le différentiel aux ailerons est tout simplement un débattement plus important vers le haut que le bas : en clair, l'aileron qui se lève le fait avec plus d'amplitude que celui qui se baisse. A quoi ça sert ? A diminuer la traînée de l'aileron qui se baisse pour éviter le lacet inverse (tendance du fuselage à partir en sens opposé à celui de l'ordre donné aux ailerons), ce qui n'est généralement nécessaire qu'avec des profils porteurs, des modèles lents, ou des ailes à grand allongement (c'est pourquoi le différentiel d'ailerons est plutôt réservé aux modèles de début et aux planeurs). Sur les avions de voltige modernes, dont les profils sont symétriques, le différentiel est donc normalement nul. Mais il arrive parfois qu’un modèle particulier ait besoin d'un peu de cette aide (par exemple le CAP à cause de ses ailes basses). Pour savoir si c'est le cas, je fais le contrôle suivant : je place l'avion en montée verticale, pleins gaz, et j’effectue un demi-tonneau à gauche. Si le nez de l'avion (pas celui du pilote, hein…) a tendance à partir vers la droite, c’est qu’il n'y a pas assez de différentiel, et si le nez part vers la gauche, c’est qu’il y a trop de différentiel. Bien sûr, si l'avion reste parfaitement sur son axe vertical, ne changez rien au débattement des ailerons !
9 – S'assurer de l’homogénéité des commandes
Il y a un dernier paramètre, un peu plus
subjectif que les précédents, à prendre en compte : l’homogénéité
des commandes (dont vous entendez parfois parler dans les essais publiés
par Modèle Mag). Cela veut dire que, durant un tonneau lent par exemple,
toutes les corrections faites au manche de profondeur et direction (dans le
cas d’un pilotage à la mode française bien entendu, c'est-à-dire
avec le manche de gauche), se font avec une amplitude à peu près
équivalente. Il ne faut pas, par exemple, avoir besoin d'une forte pression
à piquer sur la profondeur au moment du passage dos tout en n'ayant besoin
que d'une toute petite pression sur le manche de dérive. L'harmonie avec
le débattement des ailerons est également souhaitable.
Quelques soins concernent typiquement la gouverne de profondeur bien souvent
composée de deux volets distincts. Il faut naturellement que le neutre
de ces deux volets soit identique, et surtout contrôler qu'ils se déplacent
selon la même amplitude et la même vitesse (durant toute la course
du manche). Cela impose de vérifier ses servos (vitesse notamment) puisqu'il
y en a généralement un par volet. Enfin, l'amplitude du débattement
de ces volets doit être suffisante (et toujours identique, j'insiste)
pour faire décrocher le modèle ou le mettre en vrille indifféremment
à droite comme à gauche.
10 - Un dernier conseil… d'ami
Ce dernier conseil concerne la procédure
à respecter – absolument - si vous voulez obtenir de bons résultats
:
- il faut d'abord répéter plusieurs fois chaque test avant de
faire une modification de réglage.
- il faut ensuite n'effectuer qu'une seule modification à la fois, faute
de quoi vous ne saurez jamais où vous en êtes.
- il faut enfin renouveler le test pour confirmer le nouveau réglage.
Pour conclure, j’espère que ces quelques "ficelles" de
voltigeur vous aideront à régler correctement – et facilement
- votre modèle, voire à le redécouvrir grâce à
des réglages appropriés.
Bons vols, bonne voltige, et surtout beaucoup
de plaisir avec un avion enfin bien réglé !